Les Éditions Michel Lagarde : Comment est né ce projet et quelle est la répartition du travail entre Michal Rostocki et toi ?
Maria Rostocka : Nous avions dans l'idée de réaliser un projet ensemble depuis un certain temps, puisque je dessine, et que Michal a des facilités à inventer des histoires. Nous aimons beaucoup le manga japonais, surtout les dessins animées de Hayao Miyazaki. Je n'aime pas trop la littérature de fantaisie, nous avions donc pensé créer un univers surréel, mais qui n'ait rien en commun avec ce registre. On voulait créer quelque chose de nouveau.
Nous avions beaucoup évoqué l'idée d'un projet commun, mais sans décision
concrète, jusqu'au jour ou Michal m'a offert les onzes premières pages du
scenario, chacune bien esquissée, pour mon anniversaire. Tout le monde a
trouvé ça très romantique, mais ce qui l'est moins c'est qu’après avoir fait quelques croquis de personnages j'ai mis le tout en haut d'une étagère dans mon atelier, et je n'y ai pas touché pendant au moins six mois. Ensuite, je me suis remise à faire des croquis, pour ne pas décourager Michal. J'ai relevé le défi en dessinant toutes les nuits au fur et à mesure que je recevais de nouvelles pages de scenario. L'histoire me plaisait de plus en plus, j'ai même fini par adorer ce projet, et par dessiner pratiquement à plein temps.
Comme nous sommes un couple, nous avons passé beaucoup de notre temps
libre à discuter de ce projet, pour faire des changements et améliorer
notre travail. Évidemment nous nous sommes aussi beaucoup disputés,
surtout au début. Après un certain temps nous avons appris à collaborer,
et je pense que l'effet de cette collaboration à même surpassé nos
attentes. D’abord parce que nous avons réussi à mener ce projet
à son terme, au bout de deux ans.
Nous avons l'intention de retravailler ensemble sur une deuxième
bande dessinée, (qui ne sera pas la continuation de celle-ci) ce qui est
la preuve que finalement nous aimons bien travailler ensemble.
Les EML : Tu as reçu un prix très important en Pologne.
Peux tu nous parler de tes débuts dans la Bande dessinée et de la
reconnaissance de la BD en Pologne ?
MR : La Pologne est un pays qui compte 38 millions d'habitants, mais le
monde de la bande dessinée est insignifiant. Il y a plusieurs petits
festivals, et quelques concours. La bande dessinée historique est probablement le seul genre accepté du grand public, et présent dans les médias. La bande dessinée a servi de médium pour raconter l'histoire compliquée de notre pays aux jeunes depuis les années 50. Même Grzegorz Rosinski (le dessinateur de Thorgal) a fait ces débuts dans ce genre.
J'ai reçu le prix de la meilleure BD historique sur le thème de l’Insurrection de Varsovie, qui est un prix attribué chaque année, pour une bande dessinée courte dont je suis aussi la scénariste. À part L'ours, le chat et le lapin dont le scenario est de Michal, je réalise moi-même mes scénari.
Les EML : L'ours le chat et le lapin est une bande dessinée muette.
Penses-tu pouvoir faire passer plus d'émotions en te passant des mots, et cela laisse-t-il plus de place à l'imagination de tes
lecteurs ?
MR : Nous avons voulu créer une histoire qui laisse plusieurs possibilités
d’interprétation, et qui puisse être une aventure différente à la deuxième ou troisième lecture. Le fait de faire une bande dessinée muette était aussi plus naturel pour moi, je suis peintre et j'ai l'habitude de m'exprimer uniquement à travers l'image. Je pense que la narration muette exige plus d'attention et de
réflexion de la part du lecteur. C'est exactement cet effet que nous voulions obtenir.
Les EML : Comment se présentent tes originaux (qui seront exposés à Paris en février 2013) ?
MR : Les planches sont en format A3, dessinées sur du papier
carton blanc d'une épaisseur de 1,5 mm, à la gouaches et aux crayons
de couleur. il y a beaucoup de planches dont les vignettes on été
dessinées séparément, mais le tout est réalisé dans la même échelle.