Avec Charles Huard qui dévoilait la bourgeoisie de province dans toute sa ridicule suffisance, Chas Laborde aura été le dessinateur le plus féroce, le plus satirique aussi, du magazine Le Rire, qui ne devait tomber dans la platitude, la vulgarité et la gaudriole qu'après 1930.
Chas-Laborde, lui n'attaque pas la dignité grotesque de l'être humain, mais plonge au contraire dans les bas-fonds de la société, les bordels minables et les bars sordides, les quartiers du vice à bas prix et les hôtels borgnes. Il m'a toujours fait penser à un Toulouse Lautrec qui aurait oser descendre plus bas, plus profond dans la misère et le délabrement. Un Toulouse-Lautrec moins artiste aussi, moins soucieux de rendre le hideux fascinant à regarder. Chas Laborde, lui, ne semble guère chercher à plaire. Il voit sinistre, vénal, crasseux, et l'exprime avec un trait doté d'une acuité sans aucune complaisance, avec un humour gris proche de la révolte et du mépris.
Jacques Sternberg,
Dictionnaire des idées revues
Prix : 1100 euros